du probable à l'improbable

Pour faire suite à mes réflexions du 27/01, je relierai deux événements d'importance : Davos et Porto Alegre.

Nous y voyons là les deux mondes qui s'affrontent, celui du probable, Davos, et celui de l'improbable, Porto Alegre.

Davos, le changement à peine perceptible dans la continuité de la logique de marché, de concurrence, de contrôle des économies des pays en voie de développement par les plus développés qui, eux, n'entendent pas perdre certaines de leurs prérogatives...

Porto Alegre, la continuité du ton, des revendications, et des moyens dérisoires, au regard de ceux des participants au G8, pour un changement à peine perceptible de l' étendue des revendications, qui ne sont plus seulement d'ordre social et économique, contre la pauvreté et les inégalités, mais aussi politique, contre le mondialisme guerrier de Monsieur Bush, montré du doigt pour sa guerre en Irak.

De ces deux versants de notre futur possible, un mélange subtil s'opère...On voit, d'un côté, des participants de Davos s'inquiéter de la pauvreté et s'inspirer des revendications du FSM, et, de l'autre, des responsables politiques se mêler aux marcheurs du forum pour un autre monde possible...mais aussi des banquiers , des hommes d'affaires qui deviennent militants alter-mondialistes pour un moment (sincères ou récupérateurs ?)

Tout cela me conduit à penser qu'aulourd'hui le probable c'est encore et pour de nombreuses années la suprématie de l'économie sur la politique, et des plus riches sur les plus démunis, l'improbable ( mais vivement souhaité) c'est la politique se servant de l'économie comme moyen pour ré-équilibrer la planète...imposant une économie solidaire, voire favoriisant l'émergence des pays en voie de développement grace à l'effacement de certains avantages actuels des pays qui profitent de leur faiblesse.

Je suis une utopiste, je crois à un gouvernement mondial tel que le souhaitent les citoyens du monde dont je fais partie, je crois à la nécessité de la soidarité et du partage équitable des biens de cette terre, je crois aux droits de l'homme, de tous les hommes, mais je suis convaincue que tout cela ne peut être le résultat d'un soudain miracle !!!

Repartager pour équilibrer des parts, lorsque le gâteau a été mal coupé, c'est nécessairement devoir prendre un peu à l'un, pour redonner à l'autre...je suis assez naïve, et pour moi il n'y a pas d'autre solution, je n'en vois pas...je schématise, bien sûr ! Certains pays ont avancé trop vite, sont allés trop loin...ont mis en péril les équilibres de la planète...et il faudra bien qu'ils freinent un jour ....

Pour moi, la construction de l'Europe est un vrai laboratoire de cette notion de mise en commun des droits de tous, et des devoirs aussi...nous acceptons d'ouvrir les portes à de nouveaux venus, parce que nous estimons que nous serons ensuite plus forts dans cette unité ; alors il faut admettre le principe d'une remise en cause des prérogatives de certains, et l'acceptation du temps d'équilibrage entre les moins "forts", les moins "avancés", et les autres...cela doit passer par des phases de discussions, de redistributions de rôles, de mutations, d'apprentissage les uns des autres, et parfois par des pertes momentanées d' "avantages" ...Je ne vois pas comment on pourrait construire une Europe que l'on espère avant tout politique sur la base de récriminations qui parfois sont surtout inspirées par des soucis économiques, mercantiles, même de la part de Syndicats qui parlent des avantages acquis ou de revendicatios salariales avant de parler de niveau de vie général et de couverture sociale égales pour tous...(ce n'est pas toujours le cas, heureusement !)

Il me semble que tous les alter-mondialistes qui réclament un autre monde n'en sont pas à penser que cet autre monde leur demanderait peut-être de gagner moins pour permettre à d'autres de commencer à vivre, par exemple, ou de consommer moins pour permettre, en polluant un peu moins, à d'autres régions du monde que la leur de s'industrialiser un peu...j'en soupçonne quelques-uns de vouloir un autre monde où l'on ne verrait plus la misère qui nous gêne un peu, nous les civilisations nanties, mais qui pensent que c'est notre modèle qui doit faire foi...alors qu'il n'en est rien ! C'est même lui qui est cause de certaines misères. Or changer de modèle demandera plus d'efforts à tous les nantis de cette planète qu'ils ne semblent prêts, certains, à en faire ; c'est une évidence, je crois...Alors, Y a qu'à, faut qu'on, ils ont qu'à ...????

C'est toujours la même histoire...et venons en à l'Europe, plus près de nous.

Je ne partage pas la vision d'ATTAC pour cette fois, qui lance une souscription pour financer sa campagne du NON au traité constituttionnel européen, car je veux croire au dialogue possible encore après ce nouveau pacte qui unira les pays d'Europe, et que je ne vois pas ce qui pour l'instant serait un recul dangereux à le mettre en oeuvre. Parfois j'ai la vision d'un enfant un peu trop gâté, à qui l'on annonce qu'il va devoir partager avec le petit frère (ou la petite soeur) qui va arriver... Car les revendications, si je les comprends bien, ne portent que sur ce que certains auraient à perdre et pas sur ce que nous aurions tous à gagner, en réussissant ce lent travail de fédération pour construire politiquement cette Europe, qui ne peut plus revenir sur ses pas...

Le probable, pour moi, c'est le succès du oui, l'improbable c'est pour l'instant la création d'un grand espace de solidarité et d'échanges qui, si les citoyens européens le décident, sera un exemple de cet autre monde possible dans lequel les hommes seront égaux effectivement en droits et devoirs, un monde construit volontairement comme tel...

Pour cela il faut que certains lâchent du lest, perdent des avantages, quand d'autres en gagnent....

C'est la différence entre la solidarité et la charité, c'est la différence entre ce que je crois être le socialisme et le capitalisme, c'est la différence entre l'individualisme et l'esprit de collectivité....l'éternelle différence .

C'est pourquoi ma positive attitude n'est toujours pas celle de Monsieur Raffarin qui est un homme d'affaire pas forcément très partageur, protecteur qu'il est des classes les plus à l'aise déjà ! Un chef d'entreprise dans toute sa splendeur !

Ma positive attitude c'est l'attente du retour de socialistes au pouvoir, de vrais, qui auront assez de persuasion pour entraîner la France dans cette belle aventure que cette Europe qui continue de grandir. ( Il tient à nous, citoyens, que ce soit politiquement, les "verts" sont sur la voie)

Entre deux mondes, c'est celui du partage que je choisis, du partage, pas de la course à la possession, la course au fric...et je crois que trop de gens sont tombés dans le piège, sans même s'en rendre compte !!!